TOC : Theory Of Constraints ou Theorem Of Constraints ?

Tout d’abord, voici deux citations pour initier mon propos.

 L’homme est un animal crédule qui a besoin de croire. En l’absence de raisons valables de croire, il se satisfait de mauvaises
-Bertrand Russell

L’homme est un animal religieux. L’homme est le seul animal religieux.         �
-Mark Twain

Il y a près de dix ans, choqué par l’omniprésence des recettes de cuisines et slogans de gourous, je me suis lancé un challenge: pouvoir expliquer simplement le fonctionnement et l’exploitation des systèmes de production par des règles (lois) simples. Ce projet a beaucoup avancé depuis, au fil des connaissances que j’ai accumulées d’années en années.  En en attendant d’en faire quelque chose, j’extrairai de temps en temps quelques éléments pour partager avec vous.

Sur LMS, il m’est quelquefois arrivé de souligner les limites de la théorie de contrainte que Goldratt a décrit dans son bestseller : « The goal » : Petite approximation du “But” , Le lean, l’innovation, la profitabilité et le long terme, Le lean, « la culture du goulot », et la crise économique. Je dois avouer que je suis toujours frappé par les réactions des supporters de Goldratt face à mes remarques. Certains vont jusqu’à citer et interpréter des extraits de « The goal » comme un verset biblique…  J’ai beau préciser que TOC veut dire  « Theory Of Constraint » et non « Theorem Of Constraints » rien n’y fait. La différence est pourtant de taille. En effet, comme le définit un dictionnaire en ligne « Théorie : Connaissance(s) abstraite(s) et spéculative(s) indépendante(s) des applications. La théorie dure tant qu’elle résiste à l’expérience; elle se modifie et change le jour où elle est vaincue par les faits de l’expérience. Il en résulte donc que les théories ne sont que des idées provisoires que nous nous faisons des choses dans un état donné de nos connaissances ». Par opposition, un théorème, selon le même dictionnaire, est une « Proposition qui peut être démontrée par un raisonnement logique à partir de faits donnés ou d’hypothèses justifiables. ». La TOC n’étant qu’une théorie, il est donc normal qu’elle ne soit pas complètement exacte…. Il y a des choses vraies et il y en a qui ne le sont pas…

Les récents déboires de Toyota ont souligné la nécessité de comprendre la « physique des systèmes de production » et d’aller au delà d’une copie aveugle ou d’une croyance en quelque slogan ; fût-il de Toyota. Il n’y a pas de panacée et la seule solution est celle du savoir au travers de l’apprentissage et des expérimentations.  Je pense que le lean est une science et non une religion… Certains par mercantilisme ou fainéantise intellectuelle, profitant de la nature religieuse de l’homme, voudraient en faire une histoire de gourous. Cette science obéit à des règles éprouvées ou démontrables. J’en ai découvert et formulé quelques unes en faisant des « allers-retours » entre la théorie et l’action sur le terrain… C’est l’objet du projet que je finalise actuellement. J’ignore pour le moment quelle forme cela prendra mais je pense modestement qu’il sera solide vecteur de la diffusion du véritable savoir scientifique par opposition aux slogans et imprécations de gourous…

Toyota et le management de la crise : « Si vis pacem, para bellum »

Ces dernières semaines, l’on a beaucoup entendu parler des rappels de voitures par Toyota. Dans ce post, je ne reviendrai pas sur les raisons de ces rappels que j’ai, par ailleurs, abordées dans de précédent posts. Je me focaliserai sur la gestion de la crise par Toyota. Le moins que l’on puisse dire est qu’elle n’a pas été bonne. A la décharge du constructeur nippon, il faut dire qu’il est moins habitué que ses concurrents aux crises de ce genre. GM ou Ford auraient certainement fait mieux. Autre point à souligner, la non-communication est l’une des « vertus » de Toyota. En d’autres termes, la discrétion est perçue chez Toyota comme une qualité. Comme le signale Jeff Liker dans son livre « Toyota Culture », les rares fois où  Toyota a été emmené à embaucher un manager ou un futur dirigeant, l’un des points recherchés chez la personne était de ne pas « la retrouver demain à la une d’un des journaux spécialisés »… En effet, alors que les PDG des grands groupes industriels « squattent » littéralement les media spécialisés, il est très rare d’y voir « trainer » les dirigeants de Toyota. Ceci est une bonne chose…Simplement, ce qui est vrai en période normale ne l’est pas forcément en période de crise. De fait, la discrétion légendaire de Toyota s’est rapidement transformée en faiblesse… Cela a été perçu comme des hésitations et de l’opacité au début de la crise. Puis la communication a été exclusivement conduite par les responsables occidentaux du groupe (notamment les américains). Ensuite, le PDG de Toyota a ébauché quelques excuses, à la japonaise… Pas certain que cela ait impressionné grand monde. Le moins que l’on puisse dire est que Toyota devrait tirer des leçons ce cette gestion de crise de manière à être prête pour la prochaine fois… En lui souhaitant que la prochaine fois soit dans un futur très très lointain… Toutefois, à l’allure où vont les choses, je doute que la série soit close. Pour paraphraser un adage bien connu « Si vis pacem, para bellum »  (Si tu veux la paix, prépare la guerre), si le groupe Toyota veut la perfection, il doit également préparer les crises… Sa quête de la perfection ne sera pas un « long fleuve tranquille ».