Les soucis de l’Airbus A380

Je suis tombé il y a quelques semaines sur cet article du New York Times qui aborde les soucis de rentabilité du super jumbo d’Airbus. En quelques mots, selon l’article, cet avion ne correspond pas à la demande actuelle du marché. Conséquence : il y a moins d’achats que prévu, ce qui menace la rentabilité du programme. On y apprend également qu’Airbus sauve les meubles grâce à Emirates, le plus gros client de cet avion avec 140 commandes. L’ironie de l’histoire est que ces achats sont effectués afin d’utiliser l’espace disponible pour servir une clientèle haut de gamme –et non pour transporter des passagers, tel que prévu par les concepteurs de l’avion.  L’article mentionne, par exemple, les cabines de douches pour les passagers en première classe.  Signe des difficultés du fleuron d’Airbus : à ce jour,  aucun transporteur américain n’a commandé d’A380.

L’explication donnée par le NYT est,  grosso modo, la même que j’ai donnée il y a 8 ans avant la sortie de l’A380. En un mot, cet avion qui vise le transport de masse de hub à hub,  ne permet pas un mode de « consommation »  lean.  Ci-dessous les posts que j’avais publiés sur le sujet. Ils sont un peu longs car l’analyse se voulait la plus complète possible.

L’Airbus A380 : Est-ce un pari sur le transport de masse ?
L’accord aérien « Ciel ouvert » : un grand pas vers des solutions de transport aérien lean


A signaler, le succès époustouflant du 787 Dreamliner (plus petit, plus léger et plus efficient) qui est bel et bien dans une vision plus lean.  En effet, après analyse, Boeing avait conclu que le trafic se fera de moins en moins via des hubs. Ils ont prévu des vols plus directs, d’aéroports moyens à aéroports moyens. La même conclusion que celle à laquelle j’ai abouti en 2006.

Coût de la main d’œuvre vs. Productivité

La figure de la structure du coût dans l’industrie montre très bien un coût de main d’œuvre autour de 10%. Comme je l’ai souligné dans mes post précédents, dans ces conditions la baisse de la charge sur le travail, estimée à 5,5 % du coût total de la main d’œuvre par les économistes, entrainera un impact global sur le coût d’environ 0.5 pp. Ce n’est pas rien ! Cela fera certainement du bien aux entreprises. Mais ce n’est pas un « game changer ». Par contre dans le secteur du service, comme le montre l’un de mes posts précédents on aura un impact bien plus important. Par exemple, dans un fastfood, il sera de l’ordre de 1.4 pp. Simplement, comme nous l’avons vu précédemment, ce secteur est très peu multiplicateur d’emplois. Au final si l’on ne regarde que les chiffres de manière froide, l’impact de la baisse des charges sur l’économie, et les emplois en particulier, risque d’être faible. Mais vous n’êtes obligé de me croire car : 1/ L’économie n’est pas que logique et chiffres. Elle a également une dimension psychologique importante. Qui sait ? Peut-être que cela boostera la confiance des acteurs de l’économie. 2/ La deuxième raison est que je ne suis pas économiste ! De toutes les façons, l’avenir nous le dira. On est simplement dans la phase « D » du PDCA, mon outil lean favorit.

L’industrie : multiplicateur d’emplois

Les figures des deux posts précédents permettent d’apporter une réponse simple à la question : Quelle différence y a-t-il, au niveau macro, entre un emploi créé dans l’industrie et un emploi créé dans le secteur du service ?
Eh bien, à part le niveau de rémunération mentionné dans le post précédent, on peut également signaler le fait qu’un poste crée dans le service n’en créera au maximum que 0,3 chez les fournisseurs. De l’autre côté, un poste créé dans le secteur de l’industrie entraine la création de 2.2 postes supplémentaires en amont. C’est un exercice très simple. Inversement un emploi industriel détruit signifie 2,2 emplois supplémentaires qui disparaissent en amont –attention ce raisonnement ne tient pas compte de la localisation géographique des emplois. Sachant que la France détruit à un rythme effréné des emplois industriels, on comprend le caractère dramatique de la situation. La figure donne quelques clés du problème.
Impact emploi industrie vs. emploi service

Le service : la voie de l’avenir?

Voici une autre figure importante, celle de la structure du coût d’une entreprise de service. Il s’agit d’ d’un Fastfood. Il est intéressant de noter les pourcentages différents de coût de matières premières ou composants (purchase) qui passe de 71% dans l’industrie à 31% alors que la contribution de la main d’œuvre passe de 10% à 25%. Il y a quelques mois, en écoutant une RTL, j’ai entendu un ancien président du MEDEF affirmer que les emplois de service méritaient autant d’intérêt que les emplois industriels. Cela m’a surpris pour deux raisons. Première raison, comme nous le savons tous les emplois de service à quelques exception sont en général moins bien rémunérés que ceux de l’industrie. Deuxième raison, comme nous allons le voir dans le prochain post, le service génère en amont de la chaine de production nettement moins d’emplois que l’industrie. Selon mes estimations, un emploi industriel en génère 3 en amont de la chaine de production alors que dans le cas d’un fastfood, il n’y en aurait que 1, dans les meilleurs des cas. J’y reviendrai dans mes prochains posts.Structure coûts dans le service: exemple d'un fastfood